
L'arrêt prononcé par la Chambre Sociale de la Cour de
Cassation le 20 décembre 2006 est passé inaperçu
alors qu'il va engendrer une véritable révolution quant
au traitement judiciaire des discriminations à l'embauche.
Les dispositions introduites dans le Code du Travail par Martine AUBRY,
Ministre des affaires sociales, pour combattre toutes les formes de
discriminations dans les relations de travail, quand bien même
avaient-elles amorcé une avancée en retenant qu'il n'appartenait
plus à la victime d'apporter seule la preuve des faits dénoncés
mais aussi à l'employeur de justifier de ses choix, n'eurent
pratiquement aucun effet puisque le conseil des prud'hommes n'a de
compétence que pour juger des litiges nés du contrat
de travail et de sa rupture et non de ce qui précède
à savoir l'embauche ou le refus d'embauche. Or, concrètement,
l'immense majorité des faits discriminatoires se commettent
à l'occasion du recrutement. Il appartenait dès lors
à la victime d'emprunter la voie pénale qui la contraint
toujours à apporter les preuves de son accusation ou d'agir
devant le Tribunal de Grande Instance: procédures lourdes et
souvent coûteuses.
La Cour de Cassation bouleverse la donne puisqu'elle a estimé
dans sa récente décision que le conseil des prud'hommes
était désormais compétent pour juger d'un refus
d'embauche discriminatoire. Ainsi, toute personne qui considérera
avoir été exclue d'une embauche à raison de son
âge, de son état de santé, de son sexe, de son
origine, de ses orientations sexuelles, de sa race ou de sa religion
pourra saisir le juge prud'homal qui appréciera le bien fondé
de la plainte au regard des explications apportées par les
deux parties au litige. Il appartiendra donc à l'employeur
de justifier de critères objectifs et légaux dans ses
choix sous peine d'être condamné au paiement de dommages
et intérêts. Gare à l'employeur qui n'aura proposé
d'entretiens d'embauche qu'à des jeunes femmes d'origine européenne
écartant du recrutement des personnes masculines, âgées
ou d'origines étrangères présentant pourtant
un CV équivalent !